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Vins (Cap 2010) Michel Bernard (InterRhône): "Attention à ne pas niveler l'offre par le bas !"

Le président de l'interprofession des vins du Rhône, et président de Vin et société réagit au rapport Cap 2010 et ses propositions pour l'avenir de la viticulture française. Selon lui, l'idée d'un "guichet unique" Onivins-Inao est une bonne proposition.

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-Comment avez-vous accueilli la publication du rapport "Cap 2010" élaboré par Jacques Berthomeau et son "groupe des 6" ? Pourriez-vous nous dire quels sont les points positifs que vous retenez de ce rapport ?
-Michel Bernard
: Ce dont nous avions le plus besoin, c'est de nous remettre en question. Le premier point "hyperpositif" du rapport Cap 2010 est qu'un certain nombre de questions sont posées et que des propositions sont formulées.

L'idée de "guichet unique" INAO et ONIVINS par grand bassin de production avec comme plate-forme de gestion les grandes interprofessions régionales me semble par exemple particulièrement intéressante.

S'agissant des marques, il faut sans doute les favoriser, mais on peut avoir quelques réserves sur leur usage. Notamment parce que le propriétaire d'une marque en fait ce qu'il veut. S'il veut lancer une marque en AOC et ensuite la conserver pour l'utiliser pour des vins de pays ou du vin de table, rien ne l'empèche. Toutefois, il est indéniable que nous avons besoin de grandes marques pour lutter contre celles des pays concurrents. De toute façon, le rapport Cap 2010 ne dit pas de ne faire que de la marque.

Evidemment, Cap 2010 ne répond pas à tout, mais il est vrai, comme le souligne ces auteurs, qu'il n'a pas cette prétention. Je trouve ce rapport extrêmement intéressant, mais certaines des propositions qui y sont formulées doivent être aménagées. Il faut aussi mettre le rapport Cap 2010 en parallèle avec d'autres contributions, comme celle des sénateurs, ou d'autres rapports, en particulier le plan "Ambition 2010" du CNIV. Alors que Cap 2010 prend en compte l'ensemble de la filière vin en France, "Ambition 2010" est spécifique aux AOC. Bien qu'il ne s'agisse évidemment pas de dire qu'il n'y a que nous, AOC, qui sommes bons, nous avons cependant estimé que les AOC avaient des idées qui leur été spécifiques et nous avons voulu les formuler dans ce rapport.

-A contrario, quels sont les points qui vous semblent les moins positifs ou les plus délicats à mettre en oeuvre ?
-Michel Bernard
: Si je ne suis pas contre une communication sur les vins de France, j'ai toutefois quelques réserves. Il faut voir comment on compte communiquer sur ce sujet et avec quel budget. Il faut bien comprendre que les interprofessions travaillent avec un budget qui vient des cotisations des producteurs d'AOC. Pendant que les producteurs d'AOC travaillaient à maîtriser leurs rendements et leur production, certains viticulteurs hors AOC ne se sont pas imposés les mêmes contraintes. C'est la raison pour laquelle je ne crois pas que nos cotisations aient vocation à servir à la communication de vins qui n'avaient pas jusqu'ici les mêmes règles que les nôtres.

S'agissant de la grille réglementaire, je ne suis pas fondamentalement contre une classification des VPRD (Vin de pays de régions déterminées) qui pourraient comprendre des vins de pays et des vins de cépages de France en plus des AOC. Mais attention, s'ils entraient dans cette catégorie, il faudrait sans doute voir jusqu'où on compte aller dans les nouvelles pratiques œnologiques.

En prenant un exemple extrême, si on doit pousser la libéralisation jusqu'au bout, on pourrait connaître des vins de cépage meilleurs que les vins d'AOC. On ne peut pas laisser les AOC avec des rendements limités et d'autres, les vins de cépage, où on pourrait rajouter à peu près tout ce qu'on veut. On pourrait ainsi arriver, sans contrainte, à des vins d'une grande régularité qui pourraient être meilleurs que les vins d'AOC. Il ne faut pas arriver à une désorganisation de l'offre.

La capacité des vins AOC est indéniable. Il faut faire attention à ne pas niveler l'offre par le bas. D'ailleurs, qu'attendent les consommateurs ? Une politique de segmentation avec les AOC en haut. La solidarité ? Oui, mais pas une "révolution maoïste".


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